La classe débute à 13h30 avec un cours d’arabe mais ce n’est pas avant 14h30 que les bénévoles arrivent. D’abord pour les mathématiques, puis l’anglais à partir de 15h30.
La classe est appelée “Fondamentaux d’Alphabétisation et de Calcul” ou FAC. Elle a lieu au cours du troisième changement de classe de la journée, mais les filles – et c’est une classe exclusivement composée de filles – sont toujours dynamiques. Pour elles, aller à l’école reste une expérience nouvelle; les étudiants ont entre 13 et 15 ans mais pour la majorité d’entre eux, il s’agit de leur première expérience dans une classe. Le nombre d’élèves présents fluctue constamment car ils doivent composer avec leurs autres obligations: nettoyer, cuisiner et s’occuper de leurs frères et soeurs plus jeunes. Nous recevons parfois de nouveaux élèves qui n’ont jamais écrit une seule lettre auparavant; d’autres fois des élèves s’absentent pendant un mois et reviennent ensuite sans aucune difficulté. Il arrive que nos élèves partent afin de rejoindre le niveau supérieur. Deux de nos élèves récemment obtenu le Grade Trois, également enseigné dans cette classe. C’est une classe qui change constamment de visage.
Lorsque nous entrons, les filles terminent leur cours d’arabe et ne tardent pas à nous sourire et à nous interpeller “Bonjour Professeur!”. Ou bien, elles ne sourient pas; elles se sentent suffisamment à l’aise avec les bénévoles pour nous dirent si elles sont tristes ou ont eu une mauvaise journée. Nous parlons alors pendant une minute ou deux pendant qu’elles rangent leurs devoirs d’arabe et souvent le brouhaha se stabilise à un niveau de bruit modéré. La classe est toujours un peu bruyante – si ce n’est pas à cause des élèves, c’est du fait du bruit provenant de derrière les rideaux qui servent de murs. Parfois, c’est bruyant à cause du travail: les chansons sur les conjugaisons des verbes “être” ou “avoir”, les questions sur les regroupement de soustractions ou les report d’additions.
Les filles sont ici pour apprendre, mais il est également important de se souvenir qu’il s’agit d’un lieu sûr pour elles, et c’est sans aucun doute en partie pour cette raison qu’elle viennent. La classe aux murs-en-rideaux est un espace en dehors de leurs responsabilités quotidiennes et des pressions de leurs vies. Il y a des filles dans cette classe qui ont perdu leurs parents; il y en a d’autres qui sont mariées ou divorcées. Cette classe n’est en rien parfaite; pour chaque journée parfaite nous avons aussi des journées où les filles sont fatiguées et frustrées, méchantes les unes avec les autres et impolies avec les professeurs. Mais il s’agit que de certains jours et ils sont négligeables en comparaison des nombreux autres jours où nous atteignons nos objectifs. A l’intérieur de ces rideaux, nous – les bénévoles, les profs d’arabe et, plus que tout, les élèves – créons lentement mais sûrement un espace d’interaction emprunt de gentillesse et de respect, mais aussi de divertissement.
Lorsqu’on enseigne, la “réussite” est souvent mesurée par des notes sur un test, mais pendant le cours de FAC, ces notes sont juste une petite partie d’une plus grande et continue histoire de réussite. Bien sûr, les filles progressent en anglais et mathématiques; il y a un mois encore, elles ne savaient pas comment soustraire ou prononcer une phrase complète en anglais. Maintenant elles peuvent conjuguer le verbe “être” et elles travaillent sur des problèmes de soustraction de nombres à trois chiffres. Mais ces progrès sont bien fades en comparaison de la confiance en soi grandissante des filles, de leur accomplissement et de leur propre intelligence dont elles prennent de plus en plus conscience.
Nous terminons la classe sur une méditation (qui est un succès sporadique) suivie par une musique arabe pop choisie par l’une des filles. Les filles bougent, nous disent au-revoir et occasionnellement “Je t’aime prof”, et puis s’en vont, retournent dans leur monde, en étant, on l’espère, un peu plus fortes, intelligentes et confiantes qu’hier.
Écrite par Bailey Carraway.