Mon expérience comme professeur à Bukra Ahla peut être décrite en trois mots : stimulante, passionnée et pleine de nouvelles perspectives.
Pendant que j'étais professeur, j'ai dû apprendre les bases de l'enseignement informel et comment mon engagement et mes efforts allaient faire partie du chemin pour atteindre notre objectif général : enseigner à ces enfants une nouvelle langue tout en prenant en compte leur bien être et leur développement humain. Nous sommes déjà au courant de ce que ces enfants ont dû affronter pendant leur croissance : des situations instables, avoir à fuir un lieu qu'ils appelleraient leur maison à cause d'un conflit qu'ils peuvent à peine comprendre, alors qu'en même temps ils doivent s'habituer à l'idée d'avoir une nouvelle vie et un nouvel environnement, où l'apprentissage d'une nouvelle langue comme l'anglais peut leur ouvrir plus de portes pour leur éducation et ainsi, leur futur. Je n'ai eu aucun doute, à aucun moment, que l'intégralité de l'équipe du centre était au courant de cette situation et faisait tout ce qu'elle pouvait pour atteindre ses objectifs chaque jour.
Pendant ma première semaine au centre, j'ai appris l'importance de l'éducation dans l'action humanitaire dans les situations de crise et l'importance de maintenir les enfants sous protection pendant ces situations. Cela a été aussi une expérience intéressante puisque nous avons appris comment l'action humanitaire fonctionne et quelle partie de la chaîne collaborative nous représente avec d'autres organisations.
Au long de mon expérience, la communication a été un gros défi. L'arabe est l'une des langues principales au Liban, avec l'anglais qui devient un atout de plus en plus important. Pour cela, enseigner aux réfugiés l'anglais était d'une importance primordiale pour qu'ils puissent communiquer et continuer leur intégration dans la communauté libanaise. La communication a été un élément important pendant le programme, nous avons dû trouver des moyens de communiquer avec les enfants alors même que nous ne savions pas comment parler arabe, donc une grosse partie de la communication était faite avec le langage corporel et la compréhension mutuelle . Notre équipe à pris des cours d'arabe pour développer un lien au niveau de la communication avec les enfants dans les salles de classes et l'équipe dans le centre. Des mots comme "marhaba" (bonjour), "shukran" (merci) et "yalla!" (c'est parti) ont fait partie de notre vocabulaire quotidien, celles-ci et d'autres expressions arabes utilisées par les professeurs dans les classes pour maintenir un environnement académique. Même si notre étude de la langue était focalisée sur ce genre de situations, elle n'était pas limitée à ce contexte, nous avons appris l'alphabet, les chiffres, des phrases, l'écriture et la prononciation, ce qui était pour moi l'une des difficultés les plus importantes de la langue.
Être professeur est quelque chose que je voudrais réellement refaire, cela m'a appris beaucoup à proposer de moi-même, mais cela m'a aussi appris à travailler avec et pour les autres. L'éducation est un atout très important pour le développement d'un enfant dans une situation de conflit et d'autant plus pour leur réinstallation. J'ai également appris l'importance pour les enfants d'avoir quelqu'un qui veille sur eux. Comme précisé ci-dessus, avoir de bonnes qualités de communication est un élément très important pour le développement du programme. Je considérerais même cela comme l'une des plus grandes choses qui ressortent de cette expérience. Il est intéressant de trouver la compréhension mutuelle entre différentes cultures, alors que l'on n'a pas la capacité de parler le même langage verbal.
Vous apprenez qu'il y a un niveau de communication qui existe au-delà de ces limites. Je pense que c'est l'un des facteurs les plus enrichissants que l'on acquiert en travaillant avec des enfants, ils sont ouverts à un monde de possibilités et à des centaines de façons de rendre leur vie meilleure, non seulement pour eux mais aussi pour leur famille et les personnes qui sont autour d'eux. Lors de mon expérience comme professeur, je me suis retrouvé enthousiaste chaque fois qu'ils achevaient quelque chose et j'étais frustrée chaque fois qu'ils ne comprenaient pas ce que j'essayais de leur apprendre, alors je cherchais d'autres moyens d 'approcher la question, et ils étaient assez humbles pour faire de même avec moi. La compréhension mutuelle du fait que j'étais leur professeur mais que j'étais également leur élève était l'une des choses les plus enrichissantes que j'ai retenue de cette expérience. J'ai fait face aux défis que j'ai dû affronter, chaque fois que je faisais une activité et quand je réalisais que cela ne présentait pas les résultats proposés. Mais j'ai aussi apprécié poser des défis aux enfants et découvrir avec eux leur propre potentiel pour apprendre et accomplir des choses par eux-mêmes.
Dans ce cadre de travail pour une ONG qui travaille en lien avec l'action humanitaire, l'autonomisation et l'éducation, il m'a semblé que le travail d'équipe, la collaboration et la résilience étaient les qualités nécessaires pour nous aider à réaliser nos objectifs chaque jour. Vous apprenez que, peu importe ce qu'il arrive, vos objectifs doivent être atteints et réalisés avec investissement et passion. Chaque jour était différent des autres, rempli de différents défis et nouvelles situations, comme lorsque l'eau n'arrivait plus jusqu'à notre centre (nous travaillions dans le camp de Chatila) et que l'électricité s'allumait et s'éteignait deux fois par jour.
L'éducation que nous donnons aux enfants réfugiés joue un rôle crucial dans leur développement, surtout dans ces circonstances où ils ont laissé leur ville d'origine et ont commencé à s'adapter à un nouvel endroit avec une culture différente, un langage et un comportements différents. Pour cela, le travail n'est pas focalisé que sur leur apprendre une nouvelle langue ou leur faire continuer leur parcours scolaire, mais cela se concentre aussi sur leur réhabilitation de leur vie d'enfant et leur rappeler l'importance de se développer et de leur créer un monde meilleur.
Je décrirais l'expérience générale comme quelque chose d'humble et d'humain. Cette expérience d'enseigner est quelque chose que je pense tout le monde devrait essayer au moins une fois dans sa vie, pour mieux se connecter avec le monde qui nous entoure. Nous vivons dans un monde rempli d'opinions différentes et idéaux, et à travers ce genre d'implication, on peut se faire à différentes perspectives, visions et idées qui augmentent notre sens de l'empathie et nous ouvre les yeux sur les actions qui doivent être faites pour faire de ce monde un meilleur endroit pour que tous nous puissions vivre ensemble.
Auteur : Madame Huerta Hernandez