Par Jade-Leigh Tenwick, Chargée de Communication et de Développement chez SB Overseas
Lamis est une jeune fille de dix-sept ans. Une jeune fille de dix-sept ans que l'on appelle « la femme divorcée », alors même qu'elle n'est pas encore majeure. Née après l'an 2000, elle a profité de son enfance en Syrie où elle a pu aller à l'école et jouer avec ses amis. Mais tout cela a changé lorsqu'en 2012, la guerre a éclaté en Syrie. Sa famille, ainsi que de nombreuses autres familles syriennes, ont fui leur pays à mesure que le conflit s'est intensifié, et à 11 ans, elle s'est retrouvée cherchant refuge au Liban, un pays où une personne sur quatre est un réfugié .
A cause d'une politique de résidence stricte au Liban, Lamis et sa famille ont souvent dû se déplacer d'un endroit à l'autre et cette situation d'instabilité l'empêche d'aller à l'école. Plus des trois quarts des syriens qui ont fui au Liban vivent sous le seuil de pauvreté, ce qui explique l'augmentation du taux de mariage d'enfants puisqu'il est vu comme le seul moyen viable d'offrir une protection aux jeunes filles.
Et c'est dans cette situation que s'est retrouvée la famille de Lamis. Se battant pour assurer la sécurité et l'approvisionnement en ressources alimentaires de la famille, ils ont vu le mariage comme un moyen d'assurer le futur de Lamis. Par conséquent, quand un homme du quartier a demandé à la famille de Lamis la permission de l'épouser, ils ont accepté, disant à leur fille qu'elle vivrait un véritable conte de fées. N'ayant aucune expérience du mariage et aucune idée de ce qu'on allait attendre d'elle, elle a accepté cet accord.
Peu de temps après le mariage, des fissures ont commencé à apparaître dans la relation. Son mari avait des idées préconçues de ce qu'être marié devait signifier, et Lamis ne parvenait pas à se faire à ces idées. De ce fait, le mari et sa famille ont commencé à la punir, parfois jusqu'à ce qu'elle en saigne. Elle n'arrivait pas à comprendre ce qu'elle avait fait de mal et a été soumise à ces violences pendant six mois, avant d'obtenir le divorce et de s'enfuir pour retourner auprès de sa famille.
Néanmoins, les problèmes ne se sont pas arrêtés là. Le divorce, dans sa communauté et dans la plupart des communautés d'ailleurs, s'accompagne d'ostracisme. Les gens dans la rue l'appelaient « la femme divorcée » et refusaient de l'appeler par son nom. Elle est devenue un paria et sa famille a commencé à craindre pour sa sécurité, lui déconseillant de sortir seule dans les rues.
Cette histoire nous a été racontée par Lamis elle-même, qui se trouve être une des étudiantes d'une école de SB Overseas. Malgré les difficultés pour se rendre dans notre école, difficultés causées par le harcèlement de rue, elle assiste à nos cours car elle veut avoir un avenir meilleur. A l'école, elle parle ouvertement de son expérience avec les autres élèves et les encourage à prendre leurs propres décisions en disant qu'elle aurait aimé ne pas avoir été mariée si jeune alors qu'elle en subit encore les conséquences. Elle espère que ce message va encourager les autres filles à prendre leurs propres décisions et à s'orienter vers l'éducation pour s'assurer un avenir plus stable, et pas vers le mariage. Elle espère que pour elle, l'éducation sera la voie vers un avenir meilleur, et lui permettra d'avoir, comme le nom de notre centre l'indique, un lendemain meilleur : « Bukhra Ahla »
Lamis n'est que l'une des nombreuses filles de nos écoles à avoir été mariée alors qu'elle était enfant. SB Overseas travaille pour empêcher que ces mariages continuent d'avoir lieu en assurant l'accès à l'éducation pour 1 400 enfants réfugiés au Liban et en permettant l'autonomisation des femmes et des filles sur le plan économique avec nos formations professionnelles et nos cours de développement du personnel.